lundi 1 octobre 2012

Les petites fleurs, les petits oiseaux et les millions d 'emplois



Par 
JEAN-VINCENT PLACÉ 
Sénateur de l'Essonne
et 
président du groupe écologiste au Sénat




Parfois, un simple chiffre déflagre dans la vie politique comme un orage dans un ciel serein. Trois millions. Dans ce pays, 3 millions de femmes et d' hommes ne travaillent pas, pas même à temps partiel.

Il n'y a aucune autre urgence, il n'y a aucune autre obligation qui tienne devant celle-là : redonner du travail à ces 3 millions-là. Pour eux, pour eux surtout, le changement, ce doit être maintenant. Depuis six mois, et c' est à son honneur, Arnaud Montebourg court la France en tentant d'éteindre des feux qui se multiplient. Les plans sociaux s'enchaînent contre lesquels , une fois les caméras éteintes, il ne peut rien. Terrible constat d'impuissance pour celui qui prétendait réindustrialiser la France .On serait enclin à le soutenir s'il ne se jetait pas dans une impasse historique majeure. Le ministre du Redressement productif s'arc-boute sur une vision issue de la révolution industrielle, celle de la permanence des industries du passé. Pour lui, l'avenir de l'emploi en France passe par la réouverture des mines et des hauts fourneaux. Par fonction, Arnaud Montebourg est l'homme du passif. Par conviction, il est l'homme du passé.

La transition écologique de l'économie française porte en elle des millions d'emplois que, depuis des années, par incapacité à changer de logiciel économique , nous refusons de créer.

Les énergies renouvelables, l'efficacité énergétique, le recyclage, la gestion durable des ressources naturelles ...autant de secteurs d ' avenir que le manque d'investissement chronique et la faiblesse de la recherche ne permettent pas de développer en France. L'Allemagne ,les Etats-Unis , la Chine , le Danemark sont les leaders de ce marché. Selon l'Union Européenne, les seuls secteurs des énergies renouvelables et de l'efficacité énergétique permettraient de créer cinq millions d'emplois d'ici à 2020.

La France est le pays des trains ratés. Le pays du Minitel contre Internet [...]. Nous ne devons plus l'accepter. Depuis trois mois, l'énergie du gouvernement est tout entière mobilisée sur le dossier PSA et, demain, le cas Renault. Et c' est normal, et c' est juste : il ne faut pas désespérer Aulnay. Mais cela ne se fera pas sans changer de politique en matière automobile .La France est le dernier pays , ou presque, à soutenir la motorisation diesel. Notre parc est un des plus diésélisés au monde.

L'enjeu de la conversion automobile est d'abord un enjeu de santé publique : 42 000 décès sont liés en France aux particules fines.

C'est ensuite un enjeu d'emploi : si les constructeurs français continuent de produire les mêmes véhicules, ils les vendront de moins en moins dans un marché européen en surcapacité et fermeront leurs usines.

C'est, enfin, un enjeu économique : nos véhicules s'exporteront mieux si nous abandonnons le diesel dont tant de pays ne veulent pas.

Le plan automobile du gouvernement, qui va dans le bon sens, n'assume pas l'impérieuse nécessité d'adapter la filière automobile française aux exigences du développement durable. La construction de véhicules sobres, de petite taille et à vitesse limitée, un système de bonus-malus écologique, la suppression de la niche fiscale qui subventionne le diesel, un programme ambitieux de recherches publiques et privées, une incitation à privilégier les transports collectifs notamment via leur gratuité pour les familles les plus modestes ... les pistes ne manquent pas. La volonté politique, si .

Lors de l'ouverture de la Conférence environnementale, le président de la République a beaucoup évoqué la nécessité de la transition écologique de notre économie. En clôture, le Premier ministre a pris, sur ce sujet, des engagements. Pour autant, l'impression persiste que tous, au sein du gouvernement, n'ont pas acté l'importance future de l'économie verte. L'éolien est une filière d'avenir. Le solaire aussi. [...]. Comme ne le sont pas les activités liées aux hydrocarbures et aux énergies fossiles.

Le combat que mènent les écologistes est un combat pour la planète, pour les ressources naturelles, pour les pays en développement et pour les peuples. C'est aussi, n'en déplaise aux libéraux imbéciles qui serinent qu' il n'est d'autre avenir que dans un productivisme outrancier et une finance dérégulée lesquels ont conduit le monde dans les crises où nous sommes, un combat pour l'emploi, pour l'économie et pour le travail pour tous . Alors, on peut faire le tour des murs de la vieille économie sept fois en soufflant dans les trompettes du TSCG, des industries polluantes et de la rigueur en espérant qu'ils se relèvent.

Ou nous pouvons faire un autre choix. L'économie verte n' est pas un luxe pour bobos. C'est l'avenir des travailleurs de ce pays, celui de nos industries et de nos PME, celui de nos exportations et de la recherche.

Libération - 1er octobre 2012

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