jeudi 7 juin 2012

Plateau de Saclay : Agriculture, métro, et cohabitation

Ce mardi 5 juin, une réunion publique s’est tenue à la mairie de Saclay, sous la présidence de Marie-Pierre Digard, candidate "Europe Écologie – Les Verts" dans la 5ème circonscription de l'Essonne, avec pour objet initial un sujet qui mobilise fortement les habitants du Plateau de Saclay : "Agriculture et métro, la cohabitation est elle possible ?".

Le volet "Agriculture" du débat n’a pu être développé en raison de l’absence pour force majeure de François Lerique (ancien président de l’AMAP "les jardins de Cérès"), mais cette problématique était déjà bien connue de par l’unanimité des prises de position de tous bords, bien relayées par les médias locaux.

Par contre le volet "Métro" a fait l’objet d’une intervention détaillée de Pierre Serne, (vice président du Conseil Régional en charge des transports).

Entendons-le : depuis le protocole d’accord entre l’Etat et la Région Ile de France, la fusion entre leurs deux projets concurrents pour créer le "Grand Paris Express", (circuit ovale barré ceinturant la capitale), est d’une utilité incontestable.

Même si certains tronçons auraient pu être traités de façon moins coûteuse, les lignes bleues et rouge desservent des bassins d’habitation et d’emploi très denses. Mais il lui apparaît que la ligne verte du Plateau est déconnectée des urgences et préoccupations des franciliens.

Les relations ne sont pas simples entre la "Société du Grand Paris" (SGP, établissement public étatique chargé de la réalisation du réseau) et le "Syndicat des Transports d’Ile de France" (STIF, établissement public administratif chargé de l’exploitation). Le STIF est l’émanation des collectivités territoriales depuis la loi de décentralisation de juillet 2005, mais La SGP, créée par la loi Grand Paris de juin 2010, a redonné à l’Etat un pouvoir régional. Expression d’un conflit politique qui n’a fait que freiner la Région dans son effort d’amélioration des transports.

Les financements relatifs aux missions sont de sources différentes, voire interpénétrées (cf protocole d’accord Etat/Région précité). En résumé, la SGP est dotée d’effectifs généreux (presque le double des 160 agents du STIF) qui effectuent le lobbying auprès des élus. Qui ne veut pas inaugurer sa station de métro ? Où il veut, et tant pis si la connexion aux autres transports radiaux est plus problématique, elle est à la charge du STIF ! La SGP n’en est qu’à la préfiguration du réseau, et accumule à ce jour le produit des taxes dédiées, pendant que le STIF peine à entretenir l’existant. En particulier les RER B et C qui concernent la région de l’OIN, et surtout la ligne A, qui est la plus chargée d’Europe (1,2 millions de voyageurs par jour).

Alors la ligne verte du métro apparaît comme un luxe au détriment de toute la Région IdF : 4,5 milliards d’euros, pas encore budgétés, pour seulement 5.000 voyageurs par heure de pointe, 20.000 par jour. Avec cette somme, le STIF trouverait de quoi résoudre tous ses problèmes (lignes à moderniser, tunnels à agrandir, matériel à remplacer). Il pourrait remplacer ce métro du Plateau par un bus BHNS (Bus à Haute Densité de Service), 20 fois moins cher, et tout à fait adapté au flux. Et aussi créer des liaisons modernes entre le Plateau et les vallées desservies par les RER.

Ou alors c’est que masquée, l’urbanisation massive guette. Le Schéma de Développement Territorial (SDT) de Etablissement Public Paris Saclay (EPPS, autre création étatique de la loi Grand Paris) ne prévoit il pas (page 75) jusqu’à globalement 8.000 logements par an sur les 49 communes de l’OIN (Opération d’Intérêt National), soit le doublement en 30 ans de la population de cette région ?

Marie-Pierre Digard remet également en cause l’ampleur et la centralisation de l’opération Campus. Les seuls emplois crées seront le fait d’entreprises "start up" du "cluster", mais combien sur l’ensemble ? Car tous les autres, à volume constant en Ile de France, seront des emplois déplacés, avec leurs tracas de déplacement, de logement, ou de précarité.

C’est vrai que le rassemblement d’Etablissements d’Enseignement Supérieur (ENSTA, Mines, Centrale, ENS Cachan …) peut sembler séduisant et les responsables d’établissement acteurs de la Fondation de Coopération Scientifique ont signé pour rejoindre Polytechnique et Supélec. Qu’en pensent la majorité de leurs enseignants, employés, et élèves ? La mutualisation d’équipements lourds de recherche est bien sûr souhaitable, mais Agro Paris Tech Grignon a-t-elle besoin du diffuseur neutronique Soleil au point de laisser ses champs expérimentaux à 30 km ? Ne semble t’il pas absurde aussi de déplacer l’université Paris Sud d’Orsay de 3 km en l’éloignant de sa station RER pour la rapprocher d’un métro hypothétique dans 15 ans ? A moins que l’attraction du foncier libéré dans des sites très prisés ne soit visée pour financer en partie le jeu de taquin …

A notre époque, la communication entre scientifiques n’a pas besoin d’une cafeteria commune pour se réunir. La synergie est plus fonction d’une souplesse des gouvernances que de la proximité géographique. Le précédent gouvernement s’y est d’ailleurs frotté avec Polytechnique.

Un millier de participants aurait manifesté le samedi 12 mai à l’initiative du collectif "Enterrez le Métro". Avec en tête, les candidats UMP et PS.

Mais pas EELV, Pierre Serne nous dit pourquoi :

Pour lui, la meilleure façon de supprimer les nuisances, ce n’est pas d’accepter le métro et de l’enfouir, mais c’est le projet lui-même qu’il faut "enterrer".

En croyant que l’essentiel était déjà joué, une bonne partie des manifestants s’est fait enrôler insidieusement derrière la bannière des héritiers des grands projets spectaculaires (les abattoirs de la Villette, le France, le Concorde), dont les slogans ("Silicon Valley", "visibilité mondiale", "développement", "croissance") frappent les esprits et les vanités.

Pour EE-LV, l’OIN n’est pas qu'une invention du dernier Président, elle a été décrétée avant lui par Dominique de Villepin, car elle traîne dans les rêves des technocrates depuis 40 ans. Cet état d’esprit d’un autre âge subsiste dans les partis dits "de gouvernement", qui ne se posent plus la question de refaire la donne, vu "l’énergie déjà dépensée". Et qui sait si ceux qui en ont été frustrés ne sont pas tentés par la gouvernance d’un "grand machin", l’EPPS ou la SGP ?

A l’instar de nombreuses associations environnementales, et des cahiers d’acteurs de la Commission Nationale du Débat Public (CNDP), les "Verts" du Plateau ont affirmé leurs positions : vraiment contre le gaspillage des deniers publics, absolument contre la ligne de métro pernicieuse, et judicieusement pour la qualité de vie des citoyens. De quelque couleur que soient les couleuvres, Marie-Pierre Digard et Fabienne Elbaz les lèvent, elles ne les avaleront pas. Elles sont armées pour pouvoir défendre ces positions à l’Assemblée Nationale.

Texte : Meunier Michel (http://www.monsaclay.fr/)
Photo : Claude Gallas

2 commentaires:

  1. Bonjour,

    Je suis chercheur sur le plateau de Saclay et essaie d'acheter un logement pour ma famille, de préférence une maison car j'ai trois enfants et la qualité de vie entre une maison + jardin et un appartement est incomparable.

    Cependant, les prix de l'immobilier dans ce secteur sont exorbitants, complètement déconnectés des revenus des chercheurs. Un chercheur gagne entre 2000 et 3000 euros nets par mois. Le prix moyen étant de 500 000 euros.. Comment acheter? Peut-être en gagnant au loto ou en héritant d'un cousin éloigné vivant à Paris?

    Nous devrons donc nous chercheurs habiter ou en location dans un appartement très petit, ou très loin, à des kms dans une maison.

    Chers verts, il va falloir être cohérents: on ne peut pas en même temps être farouchement contre le bétonnage, et vouloir construire 500 000 logements à proximité des boulots des gens. La densification ne sera pas suffisante car celle ci consiste a la vente au compte goutte de terrain à bâtir, et donc à une explosion des prix du foncier!

    Si on compte faire ce projet campus, il faudra nécessairement intégrer une construction massive de logements dans ce secteur à prix abordable pour les chercheurs. Il faudra aussi considérer la construction de maisons individuelles et non pas uniquement d'immeubles, bien que ces derniers seront nécessaires. Il faut privilégier la construction de ZAC mixtes (terrains à bâtir libres 400-500m2 + maisons mitoyennes + immeubles avec 30% de social).

    Sinon, les meilleurs chercheurs n'auront aucun intérêt à venir s'installer ici. Autant aller en province. La construction de logements (immeubles/maisons) proche du plateau est nécessaire si l'on veut éviter les embouteillages monstres (pollution/stress)

    D'autre part, je trouve la nouvelle ligne de metro peu utile, car elle ne fait que desservir des régions déjà inabordable en terme de prix pour nous chercheurs.

    Il faudrait plutôt privilégier des lignes entre le plateau et des viles comme Dourdan/ Arpajon, la Vile du Bois, ... Une ligne ferrée en parallèle (tram) de la fameuse RN20 qui est saturée 24h sur 24.

    Il est aussi stupide que les Ulis soit une ville complètement ignorée des transports en commun ferrés, bien que tres proche du plateau.

    De plus il y a une flopée de terrains en friche dans le secteur QUI NE SONT PAS CULTIVES!! Ils sont laisser en jachères. Donc votre justification de maintenir l'agriculture dans ce secteur en interdisant les lotissements ne tient pas!!

    Les mesures à prendre en URGENCE:

    1) Il faut que le gouvernement inverse au plus vite la taxe sur la plus valus pour inciter les propriétaires de terrains à vendre!

    2) Il faut inciter les maires (de gauche en général) a changer vite leur PLU pour augmenter les surfaces constructibles, a augmenter les hauteurs de faîtage maximale (pour la constructions de petits immeubles), et surtout, a ce pas ennuyer les particuliers qui veulent construire dans le secteur. Je connais en effet plus d'un maire dans le secteur faisant de l'abus de pouvoir, refusant les permis de construire en imposant des règles stupides hors PLU, ruinant ainsi les projets de particuliers!

    J'espère vous avoir convaincu qu'il faut oublier vos égoïsmes de propriétaires sur le plateau, qu'il faut penser aussi aux jeunes chercheurs qui veulent vivre comme vous avez vécu, proche du boulot et dans une maison avec jardin. La densification est nécessaire, mais elle ne sera pas suffisante.

    Cordialement,

    Un chercheur sur Saclay.

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  2. Que pense M. Pierre SERNE des propos tenus récemment par votre sénateur M. PLACE dans les colonnes du parisien en cette période électorale?
    http://www.leparisien.fr/espace-premium/essonne-91/ma-presence-aux-ulis-peut-etre-utile-18-02-2014-3599909.php

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